Archive des webémissions: Les défenseurs des droits des personnes handicapées appellent pour un appel de Truchon

Cette semaine, nous discutons d’une lettre ouverte de deux organisations de défense des droits des personnes handicapées appelant pour un appel de la décision Truchon, ainsi que de brèves mises à jour sur l’actualité internationale.

Dans cet épisode de l’Euthanasie et l’incapacité, Amy Hasbrouck et Christian Debray discutent:

  • Les défenseurs des droits des personnes en situation de handicap réclament un appel de l’arrêt Truchon
  • Les procureurs néerlandais soulèvent des questions de consentement à la Cour suprême
  • La cour constitutionnelle en Italie statue que le suicide assisté n’est pas toujours un crime

Veuillez noter que ceci n’est qu’un script et notre webémission inclut des commentaires additionnels.

LES DÉFENSEURS DES DROITS DES PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP RÉCLAMENT UN APPEL DE L’ARRÊT TRUCHON

  • Le Conseil des Canadiens avec déficiences (CCD) et l’Association canadienne pour l’intégration communautaire (ACIC) ont adressé une lettre ouverte au procureur général David Lametti lui demandant d’interjeter appel de la décision Truchon.
  • Cette lettre arrive deux jours après que le premier ministre Trudeau avait déclaré, dans un débat francophone, qu’il ne ferait pas appel de la décision Truchon s’il était réélu. Cependant, comme le délai d’appel est inférieur à l’élection fédérale, le procureur général devra demander une prolongation, interjeter appel ou perdre la possibilité de porter appel si aucune mesure n’est prise.
  • Au 4 octobre, 65 organisations de personnes en situation de handicap avaient signé la lettre ouverte, qui est publiée aujourd’hui. Le texte de la lettre se lit comme suit:
  • Objet:  Jugement de la Cour supérieure du Québec dans l’affaire Truchon et Gladu : des intervenants réclament un pourvoi fondé sur les droits des personnes handicapées.
  • Nous, les soussignés, membres et partisans de la collectivité canadienne des personnes en situation de handicap, sommes profondément troublés par le jugement de la Cour supérieure du Québec dans l’affaire Truchon et Gladu c. Procureur général du Canada. Comme vous le savez, ce jugement invalide le critère de « mort naturelle raisonnablement prévisible » de la Loi sur l’aide médicale à mourir.  Nous vous exhortons, en tant que Procureur général du Canada, à interjeter immédiatement appel de ce jugement.
  • Ce jugement est inquiétant pour trois raisons :
  • 1)    Il ne respecte pas le pouvoir du Parlement de préserver l’équilibre entre les intérêts de la société et ceux de l’individu, limitant ainsi sa capacité de poursuivre des objectifs sociaux comme l’égalité réelle et l’inclusion.
  • La juge Christine Baudouin a conclu que le critère de fin de vie enfreignait les articles 7 et 15 de la Charte, rejetant un objectif fondamental du Parlement et éradiquant tout besoin d’une analyse des limites raisonnable de l’article 1. Le Parlement avait stipulé cet objectif sociétal dans le préambule de la Loi :
  • « Il importe d’affirmer la valeur inhérente et l’égalité de chaque vie humaine et d’éviter d’encourager les perceptions négatives au sujet de la qualité de vie des personnes âgées, malades ou handicapées. »
  • En rejetant cet objectif, la cour restreint le pouvoir du Parlement de gouverner pour un Canada inclusif et équitable. C’est un dangereux précédent.  Le Parlement a intentionnellement inclus le critère de fin de vie pour atteindre cet objectif. Est-il raisonnable pour le gouvernement de limiter les intérêts de M. Truchon et de Mme Gladu (autonomie) afin de préserver ceux de la société (égalité et inclusion)? Sans appel, nous ne le saurons jamais.  La Cour suprême doit se pencher sur cette analyse erronée.
  • 2)  Ce jugement enchâssera les stéréotypes et exacerbera la stigmatisation des Canadiens en situation de handicap, aggravant l’adversité vécue et l’oppression subie par ce groupe vulnérable.
  • Sans l’effet égalisateur de ce critère de fin de vie qui garantit un point commun à toutes les personnes accédant à l’aide médicale à mourir, à savoir une mort imminente, les personnes handicapées finiraient par y accéder également pour motif de déficience. On ne peut légalement institutionnaliser le pire des stéréotypes – à savoir que des souffrances liées au handicap et largement dues à l’absence de mesures de soutien et à l’inégalité, peuvent justifier la cessation d’une vie.
  • Le Canada doit éviter de proclamer que la vie en situation de handicap est pire que la mort.  Les Canadiens handicapés sont quotidiennement bombardés de messages de dévalorisation et de rejet.  Nous ne pouvons aggraver ce préjudice en légalisant notre soutien à tous les autres individus qui, dans le même état, décideraient de mourir prématurément.  Ce message colle de trop près au stéréotype selon lequel vivre avec une déficience, c’est avoir une vie déplorable, pleine de souffrances et de pitié. Ce scénario existe déjà. Le Canada doit en appeler de ce jugement pour prévenir d’autres stéréotypes et stigmatisations, et pour réellement garantir l’article 15 de la Charte sur les droits des personnes handicapées.
  • 3)  Sans le critère de fin de vie, la Loi canadienne sur l’aide médicale à mourir violerait en plus l’article 10 de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) qui se lit :
  • « Les États Parties réaffirment que le droit à la vie est inhérent à la personne humaine et prennent toutes mesures nécessaires pour en assurer aux personnes handicapées la jouissance effective, sur la base de l’égalité avec les autres. »
  • En offrant l’aide médicale à mourir aux personnes handicapées pour motif de déficience, le Canada violerait en outre le droit international.  Si l’aide médicale à mourir n’est pas accordée à tous les Canadiens en souffrance, mais qu’elle le soit à un Canadien ayant en plus une déficience dégénérative, c’est à ce statut de personne en situation de handicap qu’il le doit.
  • Le Canada ne prend déjà pas toutes les mesures nécessaires pour garantir une jouissance efficace de la vie sur la base d’égalité avec les autres. Cas après cas, nombreux sont les Canadiens qui, à cause de carences en soins médicaux et en mesures de soutien qui, ont envisagé, voire cherché à mettre fin à leur vie.
  • Le système canadien d’aide médicale à mourir préoccupe Catalina Devandas-Aguilar, Rapporteure spéciale des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées, Dans son rapport sur sa visite au Canada, elle a déclaré que du point de vue des personnes handicapées, la mise en vigueur de cette loi sur l’aide médicale à mourir l’inquiétait considérablement. Et elle l’a dit avant que le critère de fin de vie ne soit invalidé.
  • Monsieur le Ministre Lametti, nous vous exhortons en tant que Procureur général du Canada, à interjeter appel de ce jugement jusqu’à la Cour suprême du Canada.  Négliger de le faire prouverait que votre gouvernement n’est pas capable de défendre les personnes handicapées contre un grave et tangible danger. Après d’intenses consultations menées par des comités parlementaires et un débat public, votre gouvernement a intentionnellement et délibérément peaufiné cette Loi. Nous sommes convaincus qu’en tant que Procureur général, vous prendrez les mesures requises pour la défendre vigoureusement.  Les droits humains des Canadiennes et des Canadiens sont en jeu!
  • Les 65 organisations qui ont signé la lettre à ce jour incluent:
  • Council of Canadians with Disabilities
  • Canadian Association for Community Living
  • ARCH Disability Law Centre
  • People First of Canada
  • Canadian Mental Health Association
  • Canadian Disability Studies Association / Association candienne d’études sur le handicap
  • Institute for Research and Development on Inclusion and Society
  • L’Arche Canada
  • Canadian Institute for Inclusion and Citizenship
  • The DisAbled Women’s Network of Canada / Réseau d’Action des Femmes Handicapées du Canada (DAWN-RAFH Canada)
  • Barrier free Canada – Canada sans Barrières
  • Toujours Vivant-Not Dead Yet
  • Communication Disabilities Access Canada
  • Société québécoise de la déficience intellectuelle / Quebec Intellectual Disability Society
  • NWT Council for Disability
  • Independent Living Centre London and Area
  • British Columbia Aboriginal Network on Disability Society
  • Inclusion Selkirk
  • National Network for Mental Health
  • Families for a Secure Future
  • Citizens With Disabilities – Ontario
  • Nova Scotia League for Equal Opportunities
  • Collectif des médecins contre l’euthanasie / Physicians’ Alliance against Euthanasia
  • Coalition of Persons with Disabilities Newfoundland and Labrador
  • Interdisciplinary Master’s Program – Disability Studies, University of Manitoba
  • Nova Scotia Association for Community Living
  • Fredericton Association for Community Living
  • Disability Alliance BC
  • Inclusion BC
  • Resila INC
  • Ontario Federation for Cerebral Palsy
  • Euthanasia Prevention Coalition
  • Community Inclusion Society
  • Association for Reformed Political Action
  • Bridges to Belonging Waterloo Region, Ontario
  • Body BRave
  • Community Living Victoria
  • Community Ventures Society
  • Inclusion Alberta
  • Bethesda
  • Disability Rights Coalition of Nova Scotia
  • Living with Dignity / Vivre dans la Dignité
  • Community Living Ontario
  • The Manitoba League of Persons with Disabilities Inc.
  • Burnaby Association for Community Inclusion
  • Christian Medical and Dental Association of Canada
  • Prince Edward Island Association for Community Living
  • posAbilities Association
  • New Brunswick Association for Community Living
  • Inclusion Saskatchewan
  • Inclusion Winnipeg
  • Community Living Manitoba
  • Canadian Physicians for Life
  • Keremeos Measuring Up Team (British Columbia)
  • Disability Studies Program, Kings University College at Western University
  • Alliance for Equality of Blind Canadians (Toronto Chapter)
  • Canadian Federation of Catholic Physicians and Societies
  • PLAN
  • PLAN Edmonton
  • PLAN Calgary
  • PLAN Okanagan
  • Bridges to Belonging (Waterloo)
  • Christian Legal Fellowship / Alliance des chrétiens en droit
  • Newfoundland and Labrador Association for Community Living
  • Inclusion Yukon
  • On peut rejoindre le bureau du procureur général à webadmin@justice.gc.ca ou par téléphone à 613-957-4222.

LES PROCUREURS NÉERLANDAIS SOULÈVENT DES QUESTIONS DE CONSENTEMENT À LA COUR SUPRÊME 

  • Les procureurs de La Haye demandent des éclaircissements sur les questions juridiques entourant le rejet des accusations portées contre un médecin de maison de retraite qui a euthanasié une femme âgée de 74 ans atteinte de démence sur la base d’une directive préalable, malgré des indications selon lesquelles elle n’était pas prête à mourir.
  • La première fois que nous avons rapporté cette histoire en 2017, le comité qui a examiné les euthanasies aux Pays-Bas a déclaré que le fait de mettre un sédatif dans le café de la femme et de la contraindre physiquement pendant l’injection revenait toujours à respecter « de bonne foi » les mesures de protection de l’euthanasie. Les procureurs ont porté des accusations contre le médecin l’automne dernier, qui ont été rejetées par un tribunal en septembre.
  • La demande d’éclaircissement n’est pas un appel et le médecin ne risque pas d’être puni. La requête du procureur auprès de la Cour suprême n’est qu’une demande de conseils sur ce qu’il faut faire dans le cas où une personne incapable donne des signaux contradictoires quant à ses souhaits.

LA COUR CONSTITUTIONNELLE EN ITALIE STATUE QUE LE SUICIDE ASSISTÉ N’EST PAS TOUJOURS UN CRIME

  • Une cour constitutionnelle italienne a statué que l’assistance au suicide peut être légale si certaines conditions sont remplies. Selon « the Guardian, » quiconque « facilite l’intention suicidaire … d’un patient maintenu en vie … et souffrant d’une pathologie irréversible » ne devrait pas être puni dans certaines conditions.
  • La décision a été prise dans le cadre des poursuites contre Marco Capato, qui avait conduit Fabiano Antoniani en Suisse, pour un suicide assisté en 2017. Antoniani, dit DJ Fabio, qui a été paralysé et aveuglé dans un accident de voiture en 2014, n’avait pas de maladie incurable. Le tribunal a déclaré que l’assistance au suicide pouvait être autorisée si l’état de la personne causait « des souffrances physiques et psychologiques qu’elle considérait comme intolérables », avec l’approbation d’un comité d’éthique locale.  De plus, les autorités de santé publique devraient vérifier que toutes les conditions sont remplies.
  • La décision appelle également le parlement italien à légiférer sur la question.
TVNDY