Dans cet épisode de l’Euthanasie et l’incapacité, Amy Hasbrouck et Christian Debray discutent:
- Une décision rendue dans l’affaire Truchon-Gladu
- Un médecin néerlandais acquitté dans l’euthanasie d’une femme atteinte de démence
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UNE DÉCISION RENDUE DANS L’AFFAIRE TRUCHON-GLADU
- Une cour supérieure du Québec a déclaré inconstitutionnelle la partie de la loi fédérale sur l’aide médicale à mourir (l’AMM) qui limite l’éligibilité aux personnes dont le décès naturel est devenu raisonnablement prévisible, ainsi que l’obligation dans la loi sur l’euthanasie du Québec selon laquelle la personne doit être en « fin de vie ».
- Dans une décision de 186 pages, la juge Christine Beaudoin a confondu les limitations physiques des demandeurs avec l’incapacité de vivre de manière indépendante, en ignorant la politique publique qui les prive de ce choix en privilégiant les soins en établissements plutôt que les services d’aide personnelle à domicile dirigés par l’individu. La cour n’a pas non plus mentionné l’obligation incombant au Canada en vertu de l’article 19 de la Convention sur le droit des personnes handicapées de fournir des services permettant aux personnes en situation de handicap de vivre de manière autonome dans la communauté.
- La décision Truchon-Gladu rappelle la décision de 2012 du tribunal de première instance de la Colombie-Britannique dans l’affaire Carter, qui était à la base de la décision de la Cour suprême de lever l’interdiction du suicide assisté et de l’euthanasie (le SA & E).
- Nous n’avons pas encore fini de lire l’ensemble de la décision. Il faudra donc attendre une analyse plus détaillée. Nous offrons quelques réflexions initiales.
- Le juge accordait une grande confiance à la capacité des médecins non seulement à évaluer l’éligibilité médicale, mais également à la capacité décisionnelle de l’individu et à l’impact des pressions sociales et économiques sur les demandes de l’AMM. Cette adhésion au « modèle médical » du handicap, qui situe le « problème » du handicap chez l’individu tout en ignorant la responsabilité de la société de s’adapter à l’ensemble de l’humanité, constitue un revers pour le mouvement des droits des personnes en situation de handicap.
- Toutefois, le tribunal n’a pas posé de question sur l’inefficacité des techniques de gestion de la douleur pour les demandeurs ni le fait que les soins palliatifs sont souvent non disponibles ou inadéquats.
- La Cour applique une « présomption de compétence » à la demande d’euthanasie des demandeurs, affirmant que « comme toute autre personne apte et bien renseignée, les personnes handicapées peuvent entretenir un désir rationnel et légitime de vouloir mettre fin à leurs jours, compte tenu de leur condition. » En fait, lorsque « toute autre » personne non handicapée exprime le désir de mourir, ce n’est pas considéré comme un « désir rationnel et légitime de vouloir mettre fin à ses jours », mais plutôt une preuve d’idées suicidaires, sinon d’incompétence. Nous croyons que la cour applique deux poids, deux mesures discriminatoires qui limitent l’accès aux services de prévention du suicide pour les personnes en situation de handicap.
- Le tribunal distingue les demandeurs par leurs limitations physiques, une douleur mal gérée et leur dépendance. Bien que tous ces facteurs soient directement liés au handicap, ils sont dus à des soins médicaux inadéquats, à des politiques sociales discriminatoires et à de mauvaises attitudes vis-à-vis le handicap.
UN MÉDECIN NÉERLANDAIS ACQUITTÉ DANS L’EUTHANASIE D’UNE FEMME ATTEINTE DE DÉMENCE
- Un médecin néerlandais a été libéré de toute culpabilité dans le décès par l’euthanasie d’une femme âgée de 74 ans atteinte de démence.
- Comme nous l’avions annoncé l’année dernière, un procureur néerlandais a porté des accusations contre un médecin qui avait pratiqué l’euthanasie sur une femme qui avait signé une directive préalable demandant l’euthanasie plusieurs années auparavant, mais qui donnait des signaux contradictoires quant à son désir de mourir lorsqu’elle avait reçu l’injection mortelle. De plus, le médecin a mis un sédatif dans le café de la femme et a demandé à des membres de sa famille de la retenir au lit alors qu’elle luttait contre l’injection.
- Les juges à La Haye ont déclaré que le médecin remplissait tous les critères, bien que les procureurs aient affirmé qu’elle n’avait pas fait suffisamment d’efforts pour vérifier que la femme voulait mourir. La directive préalable indiquait que la femme voulait mourir « lorsque je trouve que le moment soit propice ». Au cours des semaines qui ont précédé l’euthanasie, des témoins ont affirmé que la femme avait déclaré: « Pas encore, ce n’est pas tout à fait si grave ».
- Les procureurs décident s’il faut faire appel de la décision.
- La décision établit le principe juridique selon lequel une directive anticipée sera considérée comme une déclaration contraignante des souhaits d’une personne, si celle-ci était ultérieurement jugée inapte à prendre des décisions pour elle-même. Les défenseurs croient que ces politiques constituent un danger pour les personnes qui, après adaptation à une incapacité, sont satisfaites de vivre avec un handicap. Ainsi, les personnes atteintes de démence ne sont pas autorisées à changer d’avis si elles décidaient que la vie avec un handicap n’est pas, en réalité, un destin pire que la mort.