Archive des webémissions: Le quatrième rapport de la Commission sur les soins de fin de vie du Québec

Cette semaine, nous examinons un autre rapport de la commission du Québec et discutons d’un acte troublant commis par un professionnel de la santé de Montréal.

Dans cet épisode de l’Euthanasie et l’incapacité, Amy Hasbrouck, Taylor Hyatt et Christian Debray discutent:

  • Le quatrième rapport de la Commission sur les soins de fin de vie du Québec
  • Un homme dit qu’un psychologue l’a encouragé à euthanasier sa femme

Veuillez noter que ceci n’est qu’un script et notre webémission inclut des commentaires additionnels.

LE QUATRIÈME RAPPORT DE LA COMMISSION SUR LES SOINS DE FIN DE VIE DU QUÉBEC

  • Le 2 octobre, la Commission sur les soins de fin de vie du Québec a publié son quatrième rapport pour la période du 1er avril 2018 au 31 mars 2019. La Commission a signalé une augmentation substantielle du nombre d’euthanasies par rapport aux années précédentes:
    • 1 331 euthanasies ont été effectuées cette année. Ajouté aux 1 630 * pour les 28 mois allant du décembre 2015 au mars 2018, cela porte le total à 2 909 euthanasies au Québec depuis que le programme est entré en vigueur. Nous parlerons dans quelques minutes de la raison pour laquelle ces chiffres ne s’additionnent pas.
    • La sédation palliative continue (SPC) a été pratiquée sur 1 243 personnes au cours de la période considérée. S’ajoutant aux 1 704 SPC réalisés au cours des 28 mois du 10 décembre 2015 au 31 mars 2018, cela porte le total à 2 947.
    • L’euthanasie et le SPC représentent chacun 1,9% des décès au Québec dans la période de référence, pour un total de près de 4% de tous les décès dans la province.
    • * Comme expliqué à la note 19 à la page 27, 1 630 décès dus à l’euthanasie sont un total corrigé du rapport de synthèse de la Commission publié au printemps dernier. Apparemment, « deux AMM déclarées par un établissement comme ayant été administrées n’ont pas été administrées ».
  • Le nombre exact de morts par euthanasie est difficile à déterminer dans le rapport.
    • Aux pages iii, 12, 27 (note de bas de page 19), 37 et 38, le rapport indique que « 1 279 personnes ont reçu l’AMM entre le 1 er avril 2018 et le 31 mars 2019 ». Ce chiffre, ajouté aux 1 630 des années précédentes, donne le total signalé de 2 909.
    • Toutefois, à la page 23, le rapport indique que « selon les rapports des établissements, 1 937 demandes d’AMM ont été formulées entre le 1er avril 2018 et le 31 mars 2019. De ce nombre, 1 271 AMM ont été administrés et 672 AMM n’ont pas été administrés ».
    • Le chiffre 1 271, ajouté aux 60 euthanasies pratiquées par des médecins en dehors du cadre institutionnel et rapporté par le Collège des médecins du Québec (CMQ), donne un total de 1 331 euthanasies.
    • Peut-être vous avez remarqué que 1 937 moins 672 n’équivaut pas à 1 271, mais à 1 265. On retrouve ces six personnes disparues dans une note liée à la figure 3.17, qui dit que les résultats des six demandes d’euthanasie dans la région 10 ne sont pas affichés. La Commission explique: « Afin de respecter les règles de confidentialité et en raison du risque d’identification relié à la divulgation d’un faible nombre d’individus, la répartition exacte des AMM administrées et non administrées n’a pu être fournie ».
    • Quant au chiffre 1 279 utilisé ailleurs dans le rapport, on ne sait pas d’où ça vient, ou si ça inclut (ou non) les 60 euthanasies déclarées par le CMQ. Et si vous pensez que nous sommes un peu pointilleux, rappelez-vous que les lois sur l’euthanasie sont censées imposer « des limites strictes scrupuleusement surveillées et appliquées ».
  • Cette année, la Commission a reçu 1 400 rapports d’euthanasie, dont certains documentent des euthanasies effectuées avant la période de référence. « La Commission souligne que 86 formulaires ont été reçus plus de six mois après l’administration de l’AMM et certains d’entre eux plus d’un an après ». Quelques points à noter sur le processus de la Commission:
    • La Commission ne peut évaluer que le respect de la loi; elle n’a aucune influence sur les autres aspects de la pratique médicale, même si ces décisions peuvent affecter l’euthanasie. Donc, par exemple, si le médecin fait une erreur de diagnostic ou se trompe sur la cause d’une baisse de capacité, cela ne relève probablement pas de la compétence de la Commission.
    • Les deux tiers des commissaires doivent convenir qu’il y a eu violation pour qu’une constatation de non-conformité soit établie. Ces cas sont transmis au conseil des médecins, dentistes et pharmaciens de l’établissement (CMDP) et au CMQ. Il n’existe aucun recours pour les proches des personnes inéligibles qui sont euthanasiées ou dont les protections sont ignorées.
    • Cette année, la Commission a mis en place une nouvelle procédure d’évaluation des rapports en réponse au nombre croissant d’euthanasies. Les déclarations sont examinées par un sous-groupe comprenant au moins trois commissaires; si tous les membres du groupe conviennent que les critères d’éligibilité ont été remplis et que les garanties ont été respectées, le cas est recommandé pour approbation par toute la commission. En cas de désaccord dans le petit groupe, le cas est renvoyé à la commission au complet pour une discussion plus approfondie.
  • La commission a examiné pour la première fois 1 384 déclarations et avait besoin d’informations supplémentaires ou avait des questions sur 31% des cas, soit 430 d’entre eux. La Commission a constaté que 96% des 1 354 cas sur lesquels elle avait statué étaient conformes à la loi, mais elle n’a pas abouti à une décision dans 41 cas (3%), car elle n’a pas obtenu les informations demandées au médecin. La commission a constaté que 13 euthanasies (1%) n’étaient pas conformes à la loi.
    • Quatre personnes n’étaient pas éligibles:
      • Trois personnes n’avaient pas de maladie grave et incurable (elles avaient toutes la hanche cassée);
      • La carte d’assurance maladie d’une personne était expirée.
    • Dans neuf cas, les garanties ont été violées.
      • Le deuxième médecin a examiné la personne avant la signature de la demande d’euthanasie dans cinq cas.
      • Le médecin qui a administré l’AMM n’a pas mené lui-même les entretiens avec la personne pour s’assurer du caractère éclairé de la demande ou de la persistance de ses souffrances et de la constance de sa volonté d’obtenir l’AMM. « Dans deux cas, le médecin qui a administré l’AMM a rencontré la personne la journée de l’administration de l’AMM ».
      • Une personne non qualifiée a été témoin du formulaire de demande.
      • « Dans un cas, le second médecin consulté avait un lien familial avec le médecin qui a demandé l’avis ».
  • 65% de ceux qui ont demandé l’AMM l’ont reçu.
  • Les trois principales raisons pour lesquelles l’euthanasie n’a pas été administrée sont les suivantes:
    • La personne ne répondait pas ou plus aux critères d’admissibilité (246 personnes, ou 37%)
    • La personne est décédée avant la fin de l’évaluation ou avant l’administration de l’AMM (224 personnes, ou 33%)
    • La personne a retiré sa demande (127 personnes, ou 19%).
  • Une proportion importante de personnes (40 %) a reçu l’AMM moins de 10 jours après en avoir fait la demande.
  • « Selon les données de la Régie d’assurance maladie du Québec  (RAMQ), 682 médecins ont déclaré des honoraires pour des actes divers relatifs à l’AMM ». Selon le CMQ, sur 23 478 médecins inscrits, 480 déclarent avoir effectué une euthanasie en 2018.
  • Si ce rapport contient un message à retenir, il est probable que le nombre de décès dus à l’euthanasie augmente rapidement et que les procédures sont bâclés. Nous n’embarquerons toujours pas dans un avion qui a 1% de chance d’écraser et un facteur d’incertitude de 3%.

UN HOMME DIT QU’UN PSYCHOLOGUE L’A ENCOURAGÉ À EUTHANASIER SA FEMME

  • Le 2 novembre le CTV News a publié un article sur un psychologue qui aurait conseillé à un homme de Montréal de tuer sa femme, atteinte d’une maladie terminale.
  • Serge Simard a demandé l’aide d’un professionnel après que son épouse, Miranda Edwards, eut reçu un diagnostic de cancer. Mme Edwards était « déterminée à le combattre », disant « Je veux vivre, je veux toutes les interventions médicales possibles … Je ferai tous les traitements [possibles] pour rester en vie ».
  • M. Simard dit que le psychologue « lui a dit de donner une surdose de la morphine à sa femme qui l’avait été prescrite pour la douleur ». Après avoir entendu cela, M. Simard a enregistré le reste de la séance sur son téléphone. L’enregistrement a capturé les mots: « À un moment donné, la dose sera trop forte et elle ne se réveillera pas. C’est la meilleure chose qui puisse arriver, vraiment. Elle ne souffrira plus. Elle sera dans un meilleur endroit. » L’identité du psychologue ne peut pas être révélée car la personne n’a pas été accusé d’un crime.
  • M. Simard se dit « horrifié » par la réaction du professionnel. Pourtant, il a distingué l’AMAM de l’action qu’on lui était conseillé de prendre. « Ce n’est pas du suicide assisté, c’est un meurtre. Je ne vais pas assassiner ma femme. Si Miranda exprime [son souhait de mourir], je respecterai ses souhaits. Miranda n’a jamais dit qu’elle voulait mourir ».
  • M. Simard et Mme Edwards ont déposé une plainte professionnelle contre le psychologue, mais ont été informés que la personne avait pris sa retraite. Si le psychologue recommencent à pratiquer, une enquête peut être ouverte. Jusqu’à présent, les policiers de Montréal et de Gatineau ont refusé d’agir. Le couple est « déçu » de la réponse. Ils peuvent envisager de porter l’affaire devant un tribunal civil.
TVNDY